Amusant ou sérieux ? Le producteur de musique polonais Donatan (dont le nom civil est un peu plus prosaïque : Witold Czamara) a présenté un clip de musique rap provocateur. Certes, il divise les opinions. Mais son succès doit être pris au sérieux. En quelques semaines, le clip sur Youtube a été visionné pas moins de 30 millions de fois. La courte pièce s'intitule "My Słowianie" (Nous, les Slaves).

S'agit-il d'un réveil culturel pan-slave ? En tout cas, au début, nous voyons un jeune homme - Donatan - s'extirper de son lit de plumes dans un chalet de ferme, suivi de deux jeunes femmes qui ont manifestement dormi dans le même lit. Mais c'est maintenant que les choses commencent vraiment : dehors, dans la cour, une Polonaise provocante danse sur des talons hauts, entourée d'autres paysannes en costume traditionnel. Des paysannes aux maquillages éclatants et aux décolletés profonds laissent couler un liquide blanc sur leur visage (bien sûr, ce n'est que du lait).

Les filles sont en train de battre la crème dans leur baratte à beurre, mais, comme le révèlent leurs regards lascifs, elles ont manifestement une toute autre idée en tête. De temps en temps, on aperçoit une vieille babouchka qui se balance avec un foulard et, bien sûr, Donatan lui-même : avec des lunettes noires qui, comme le chant grinçant des filles, rappellent quelque peu le rappeur Psy et son Gangnam Style. Le reste pourrait également provenir du calendrier français des jeunes agriculteurs ...

Plutôt sexiste, on aimerait commenter culturellement conservateur. D'autre part, nous avons également affaire à un jeu audacieux de clichés : Les femmes polonaises sont plus belles que la moyenne. Ce topos est apparu à maintes reprises depuis le récit de voyage de Heinrich Heine "Sur la Pologne". Les paroles de la chanson dans la vidéo relient le topos aux vertus d'être terre à terre et proche de chez soi.

"Nous, les Slaves, savons comment les nôtres nous affectent", est-il écrit, et la réponse des femmes est : "Nous, les Slaves, savons comment parler le langage du corps". Le caillé du fermier et la vodka comme base de la vie "sont meilleurs que le whisky et le gin". En un mot : le sang chaud des Slaves produit tout simplement "la beauté et la grâce" en abondance.

Le T-shirt du protagoniste indique de manière programmatique : "N'oublie pas d'où tu viens". Contre le complexe d'infériorité des "Ossis" d'Europe, la vidéo pose avec défi la fierté de ses propres origines. Le fait que les coqs chantent ici et que le toit soit en chaume n'est apparemment plus nécessaire pour se cacher de nos jours. Il y a quarante ans, Vicky Leandros chantait la phrase "J'en ai marre de cet air de campagne" dans sa chanson à succès "Theo, wir fahr'n nach Lodsch". Mais c'était il y a longtemps. Les temps changent.

 

Mais pourquoi, pour l'amour du ciel, Donatan chante-t-il les Slaves en général plutôt que les Polonais dans tout cela ? Dans le débat sur la vidéo, mené principalement dans les médias Internet polonais, cette question a été posée à plusieurs reprises. Les gardiens de la tradition ont fouillé dans le passé du musicien et ont découvert qu'il avait passé les années formatrices de son enfance en Russie, c'est-à-dire chez l'ennemi juré.

Aha, le Pan-Slavisme ! L'affaire semble claire jusqu'à présent. En outre, l'accent mis sur le slavisme est à replacer dans le contexte des courants néo-païens, dit-on maintenant sur le net, comme on en trouve aussi en Pologne. Des voix plus prudentes ont fait remarquer que l'accent mis sur les liens familiaux slaves en Pologne (semblable à l'appel aux "ancêtres" germaniques en Allemagne) est très impopulaire aujourd'hui. Au plus tard depuis la fraternité forcée de l'époque soviétique, l'unité des Slaves propagée au XIXe siècle a été compromise.

Tirons maintenant une conclusion du débat : Les Polonais, selon toute apparence, se considèrent aujourd'hui avant tout comme des Européens. Et en ce qui concerne les femmes, Heinrich Heine avait raison. Ou Karl Millöcker. Dans son classique d'opérette "Der Bettelstudent" (L'étudiant mendiant), on peut lire : "Le charme de la femme polonaise est inégalé" !